Une nouvelle lame de fond se dessine sur le marché du travail : deux travailleurs belges sur trois (64 %) envisagent de changer d’employeur dans l’année à venir. Ce chiffre marquant, issu de la dernière enquête Talent Pulse d’Acerta et Stepstone, frôle les records et signale bien plus qu'un simple frémissement. Pour les leaders du capital humain, il s'agit d'une transformation profonde des aspirations professionnelles qu'il est crucial de comprendre pour agir.
Un marché du travail paradoxal, entre désir d'ailleurs et prudence
Si l'intention de départ est massive, elle est aujourd'hui tempérée par un réalisme nouveau. L'incertitude économique a visiblement refroidi l'euphorie du marché. Alors que l'an dernier, un tiers des travailleurs (32 %) pensaient pouvoir retrouver un emploi en quelques semaines, ils ne sont plus qu'un quart (28 %) à partager cet optimisme.
Ce paradoxe dessine un nouveau terrain de jeu. La mobilité devient plus réfléchie, ce qui ouvre une fenêtre d’opportunité cruciale pour les entreprises capables de réengager leurs collaborateurs en proie au doute, avant qu'ils ne fassent le grand saut. La guerre des talents se joue désormais autant sur la rétention proactive que sur l'attraction.
L'enseignement le plus percutant de l'étude est la nature même de cette envie d'ailleurs. Pour les trois quarts des candidats au départ, il ne s'agit pas d'un simple ajustement de carrière. Ils aspirent à un changement radical, visant à la fois un nouveau secteur et une nouvelle fonction. Cette aspiration à une réinvention totale signale un décalage profond, qui ne peut être comblé par une simple augmentation ou un nouveau titre. C'est la preuve que la discussion doit porter sur le sens du travail, la mission et l'alignement avec la culture d'entreprise.
L'enquête identifie avec une clarté redoutable les déclencheurs qui poussent un collaborateur à envisager un départ. Ces points de rupture agissent comme de véritables signaux d'alarme pour toute direction d'entreprise :
Ces trois éléments invitent à un audit permanent de l'expérience collaborateur. Ils poussent à interroger l'authenticité des valeurs affichées, la réalité des politiques de flexibilité et l'existence de parcours de carrière clairs et stimulants.
Dans ce tableau de grande mobilité, une donnée surprend et offre la perspective la plus prometteuse. Près de trois jeunes de moins de 30 ans sur dix (28 %) affirment vouloir rester chez leur employeur actuel pour toute leur carrière. Loin du cliché d'une jeunesse "zappeuse", cette aspiration à la stabilité est une main tendue que les employeurs visionnaires sauront saisir.
Cette opportunité est d'autant plus concrète que 6 travailleurs sur 10 se disent prêts à changer de fonction en interne pour éviter de quitter leur entreprise. La fidélité n'est donc pas morte ; elle attend d'être cultivée. En faisant de la mobilité interne un pilier stratégique de la gestion des talents, les entreprises peuvent transformer cette soif de nouveauté en un moteur de croissance interne. Le meilleur moyen de ne pas perdre un talent est souvent de lui offrir sa prochaine opportunité.
En conclusion, l'enquête Talent Pulse 2025 ne dépeint pas une fatalité, mais un appel à l'action. La "Grande Ambition" des travailleurs belges est une invitation à repenser le contrat social en entreprise. Les organisations qui prospéreront ne seront pas celles qui subiront cette vague, mais celles qui la transformeront en une dynamique de développement partagé, en alignant les valeurs, en réinventant les carrières et en faisant de la durabilité de l'emploi leur meilleur atout.